
Comme chaque mois, je siégeais avec mes collègues pour une session plénière à Strasbourg. Retour sur les textes importants de cette plénière :
Situation des droits de l'homme dans le contexte de la Coupe du monde de la FIFA au Qatar
La coupe du monde 2022 au Qatar est une aberration tant sur le plan humain qu’écologique.
En 2020 déjà avec deux de mes collègues, Sylvie Guillaume (S&D) et Saskia Bricmont (Green/EFA) nous avions dénoncé cette coupe du monde de la honte et nous demandions que le Qatar mette immédiatement en place les mesures de protection des travailleurs et de compensations que nous demandons pour les familles des victimes. Pourtant rien n’a eu lieu.
Cette résolution et ce débat, obtenue par ma collègue Manon Aubry au nom de notre groupe The Left, était une nécessité et je suis ravie que le Parlement européen montre une position forte en ayant voté ce texte pour condamner la corruption au sein de la FIFA qui est "endémique, systémique et profondément enracinée ». De demander au Qatar et à la FIFA d'indemniser toutes les victimes des préparatifs de la Coupe du monde et de montrer que la FIFA a gravement porté atteinte à l'image et à l'intégrité du football mondial.
Le football est le sport du peuple et doit le rester!
Décisions des organisations européennes de normalisation
La standardisation est un sujet hautement politique puisqu’il participe à l’autonomie stratégique européenne. En effet, les organismes européens prennent des décisions sur plus de 20 000 normes, notamment industrielles, pour la protection - entre autre - des consommateurs.
Depuis l’année dernière, la Commission, notamment sous l’impulsion de Thierry Breton, s’est largement emparée du sujet, en estimant que la participation de pays tiers aux décisions prises par les organismes européens de normalisation doit être encadrée et clarifiée. En effet, parmi les 3 principaux organismes européens de normalisation, le manque de transparence et de cadre relatif aux procédures d’adoption des normes a permis à certaines puissances étrangères (notamment la Chine ou les USA), de pouvoir s’immiscer dans les processus de prises de décision des normes européennes, et ainsi influer directement sur les caractéristiques techniques d’un certain nombre de produits mis sur le marché européen, pour favoriser leurs produits. Ce sujet étant primordial pour la protection de l’économie européenne, et la protection des consommateurs, j’ai naturellement voté en faveur de ce rapport.
Nécessité d'une solution européenne en matière d'asile et de migration, y compris en matière de recherche et de sauvetage
Les politiques européennes en matière d’asile et de migration contribuent à l’Europe forteresse qui est contraire aux valeurs européennes.
Accueillir dignement des personnes dans le besoin est juste humain. Débattre sur oui ou non nous devons sauver des embarcations dans la mer est inhumain, parce qu’il n’y a pas de débat à avoir. La mer Méditerranée, la Manche, la mer Égée sont devenues des cimetières où la violence des gardes-côtes et des gouvernements autoritaires entravent le droit maritime. Nous parlons de femmes, d’enfants et d’hommes à sauver, des personnes qui ont des histoires, une vie pas des statistiques.
Avec le réchauffement climatique en cours, comment allons-nous garder notre humanité si petit à petit les États membres ferment leurs frontières, nous avons déjà des réfugiés climatiques et ils ne sont pas protégés par la convention de Genève. Nos politiques d’asiles et de migration doivent changer pour plus d’humanité et une Europe solidaire.
Reconnaissance de la Fédération de Russie en tant qu'État soutenant le terrorisme Cette résolution visait à désigner la Russie comme Etat soutenant le terrorisme, à la suite des campagnes de bombardements russes contre des civils, des infrastructures civiles et exactions russes dans les territoires occupés ukrainiens. Les exactions russes étant inexcusables, notamment avec le groupe Wagner, organisation paramilitaire terroriste, j’ai donc voté toutes les parties du texte, ainsi que les amendements, allant dans le sens de la condamnation. Seulement, plusieurs raisons m’ont poussé à m’abstenir sur la proposition de résolution. D’abord, parce que le concept d’Etat « soutenant le terrorisme » est flou et n’existe pas dans le droit international, ces instruments sont juridiquement bancals se placent au-dessus du droit international. Seul certains pays, comme les Etats-Unis, possèdent leur propre liste de pays « soutenant le terrorisme », et utilise l’extraterritorialité de leur droit pour les condamner, chose que nous avons condamner à de nombreuses reprises. Le droit international actuel peut et doit s'appliquer, notamment en matière de documentation et de jugement des crimes de guerre de Poutine. L’Union européenne se sert déjà du droit, à travers les sanctions économiques (le 8ème paquet vient d’être mis en place), ce qui pénalise grandement la Russie, et son économie.
Ensuite, parce que la désignation de la Russie comme État terroriste n'aura aucun effet sur le terrain. Le régime russe s’est pris dans une fuite en avant qui ne peut s’arrêter qu’avec sa défaite ou la négociation. La sortie du conflit ne peut se faire que par la voie diplomatique. L’Union européenne se doit de maintenir, sans naïveté, les rares canaux de discussions et de désescalade encore ouverts. Ce lien est d’autant plus important que nous sommes face à un risque d’escalade du régime russe qui perd cette guerre et agite la menace de l’utilisation de l’arme nucléaire et du renforcement des bombardements sur les populations civiles. Cette volonté de garder la porte ouverte aux discussions avec Poutine est d’ailleurs soutenue par le président Emmanuel Macron, et le président Biden.
En m’abstenant sur cette résolution, je choisis donc de garder une position pragmatique et rationnelle pour une sortie de guerre rapide, qui ne pourra se faire que par la voie diplomatique, Cela n’est en aucun cas un soutien à la Russie, Poutine et son gouvernement meurtrier, comme j’ai pu le montrer sur mes vote de l’ensemble des résolutions votées par le Parlement, qui dénonçait les crimes de Poutine et appellent l’Union européenne à soutenir le peuple ukrainien dans sa résistance depuis le début du conflit. Situation des droits de l’homme en Afghanistan, en particulier la détérioration des droits des femmes et les attaques contre les établissements d’enseignement
Cette résolution vise à dénoncer clairement et en détail l’interdiction d’enseignement pour les jeunes filles à partir de 12 ans et les multiples détériorations des droits des femmes, notamment en interdisant aux femmes de se promener seules dans l’espace publique et l’arrestation de femmes activistes, opposantes au pouvoir. Le texte maintient donc sa position de ne pas reconnaître le régime et appelle à la mise en place d’un gouvernement représentatif et élu.
Par ailleurs, la situation économique du pays ne fait qu’empirer. La flambée des prix des denrées alimentaires et du carburant a laissé environ 95 % de la population au bord de la famine et a provoqué des niveaux de malnutrition sans précédent. Il faut ajouter à cela la crise climatique qui touche particulièrement l’Afghanistan, un des pays les plus vulnérables du monde face aux chocs météorologiques, qui menace également la population de famine. Le texte demande également d’intensifier notre aide humanitaire. J’ai donc naturellement voté en faveur de cette résolution.
Aboutissement de la modernisation du traité sur la Charte de l'énergie
Cette résolution porte sur le résultat de la modernisation du Traité sur la Charte de l’énergie (TCE), traité international multilatéral d’investissement dans le secteur de l’énergie datant de 1998. Depuis des années, ce traité est extrêmement critiqué par mon groupe, la Gauche, puisqu’il octroie des droits et protections très étendus aux investisseurs dans les énergies, y-compris fossiles. Il leur permet notamment d’engager un recours devant un tribunal d’arbitrage privé et de réclamer des milliards d’euros en compensation de politiques publiques. Ce traité favorise donc la destruction de l’environnement, puisque cela sera toujours l’argent qui primera sur le climat. C’est d’ailleurs pour cette raison que certains États membres, comme l’Italie et l’Espagne, ont quitté le traité, bientôt rejoints par la France et l’Allemagne.
Un processus de modernisation du Traité a été engagé à partir de 2017 et a abouti en juin 2022 à une proposition de nouvelle version du traité. Mais cette réforme soutenue par la Commission est très superficielle.
La résolution votée est un signal fort du Parlement européen pour appeler au retrait de l’Union européenne de ce traité. J’ai donc naturellement voté en faveur.
Anne-Sophie Pelletier