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Retour sur la session plénière de juillet 2023

Comme chaque mois, je siégeais avec mes collègues pour une session plénière à Strasbourg, la dernière avant la pause parlementaire. Retour sur les textes et moments importants de cette plénière.


Restauration de la nature : des ambitions affaiblies par la droite et l’extrême-droite


Face à l’urgence climatique, l’Union européenne a proposé en 2019 la mise en place d’un Pacte vert européen, calqué sur le modèle du Green New Deal, afin d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon de 2050. Parmi ce plan, plusieurs textes dont l’Ajustement à l’objectif 55, la loi européenne sur le climat, la stratégie de l’UE pour l’adaptation au changement climatique ou encore la stratégie « de la ferme à l’assiette ». Dernier texte en date, la loi sur la restauration de la nature qui a été finalement votée, non sans mal.

L’activité humaine liée au système de production détruit les habitats et provoque une destruction spectaculaire de la biodiversité sur Terre. En Europe, 81% des écosystèmes et 70% des sols sont dégradés. En réponse, la Commission européenne a proposé la mise en place d’une loi consistant à prévoir des mesures contraignantes à mettre en œuvre pour restaurer la nature dans l’UE, avec pour objectif de recouvrir 20% des terres et des mers de l’UE d’ici 2030, et l’ensemble des écosystèmes qui ont besoin d’être restaurés d’ici 2050.

Mais, si le texte avait une volonté positive de restauration de la nature, il s’est malheureusement heurté à une grande alliance, autour de la droite, de l’extrême droite, et d’une partie du groupe Renew. Portée par des contre-vérités, notamment autour des menaces sur la sécurité alimentaire et d’un poids financier supplémentaire sur les agriculteurs, leur stratégie a simplement été de vouloir entériner le texte. Ainsi, ils ont bloqué toutes les discussions dans les différentes commissions et sont même parvenus à ne pas retenir les modifications de la commission ENVI, responsable des sujets environnementaux, car cela n’allait pas dans leur sens. Finalement, après plusieurs péripéties, le texte a été adopté à une courte majorité ce mercredi 12 juillet, mais fortement affaibli et dépourvu de nombreuses de ses ambitions. Maintenant, le sort de ce texte si important est entre les mains des négociateurs, qui discuteront en trilogue.

Au vu de l’urgence climatique dans laquelle nous sommes, et dont nous sommes tous les victimes collatérales, il est plus que temps que les institutions européennes et les députés européens prennent des mesures fortes pour lutter contre le changement climatique. Mais les députés de droite et d’extrême droite préfèrent continuer de privilégier le commerce, les profits, plutôt que tout mettre en place pour sauver les générations futures. A croire que nous vivons pas sur la même planète.


Tax the rich : pour l’égalité sociale


Depuis de nombreuses années, le débat sur la taxation des riches fait rage sur la scène politique française. Cette fois-ci, cette mesure était débattue au Parlement européen.

Alors que le monde a connu de nombreuses crises depuis 2020, celles-ci n’ont pas fait que des malheureux. D’après le dernier rapport d’OXFAM, sorti en janvier 2023, les 1% les plus riches ont capté 63% des richesses produites, près de deux fois plus que le reste de la population mondiale depuis 2020, et les profits des grandes entreprises ont atteint des records sans précédent.

Les milliardaires à travers le monde ont gagné plus de 2,7 milliards de dollars par jour depuis le début de la crise tandis que les entreprises des secteurs de l’alimentation et de l’énergie ont plus que doublé leurs bénéfices en 2022. En France aussi, les milliardaires ont pu tirer leurs épingles du jeu : depuis 2020, leur fortune a augmenté de plus de 200 milliards d’euros, soit une hausse de 58%, Bernard Arnault, désormais l’homme le plus riche au monde, qui possède une fortune équivalente à celle cumulée de près de 20 millions de Français et Françaises. Alors que pendant ce temps-là, l’explosion des prix de l’énergie et des biens de première nécessité appauvrit de plus en plus de monde et touche particulièrement les plus précaires. Plus de 820 millions de personnes souffrent de la faim. Face à cette indécence, il est temps de taxer les superprofits et de mettre en place une véritable lutte contre la fraude fiscale. Tout ceci permettrait de réduire les inégalités sociales, de permettre une redistribution, et d’obtenir des ressources propres à dépenser dans les services publics, ou la lutte contre le changement climatique.

Ce débat va continuer et s’intensifier dans les années, à l’heure où les inégalités se creusent de plus en plus, il est temps que les riches paient à hauteur de leurs moyens.

C’est une question de justice sociale.


Accès publics aux documents : un devoir pour les institutions européennes


Qatargate, SMS Gate, Affaire Dentsu/Hofmann, Frontex, de trop nombreux scandales ont éclaboussés les institutions européennes ces dernières années et impacté durablement la confiance des citoyens dans l’Union européenne. Désormais, l’image de l’Europe de l’argent, prime sur l’Europe des gens. Ce rapport annuel concernant l’accès public aux documents souligne une nouvelle fois le grand nombre de refus d’accès aux documents pour les citoyens et met en lumière les lacunes qui entravent cet accès. C’est pourquoi, il demande une implication plus importante des citoyens dans le processus décisionnel et de gouvernance des institutions de l’Union, et rappelle l’importance de la transmission des documents à chaque étape de la procédure législative. Par ailleurs, il regrette l’attitude de la Commission qui refuse la transmission des documents relatifs aux négociations législatives, regret partagé par la Médiatrice européenne.

Depuis le début de mon mandat, je me bats pour améliorer la transparence des institutions. A travers mon rapport sur la médiatrice européenne, mon rôle de rapporteure fictive sur le dossier de l’accès public aux documents, mes questions écrites sur Dentsu/Hoffman, je ne cesse de marteler ce message : sans transparence, pas de confiance. Et à l’heure où la défiance envers l’Union européenne et ses institutions grandit, il faut prendre des décisions importantes pour retrouver la confiance des citoyens. En ces temps sombres, ce sont la clarté et la transparence qui rallumeront peut-être les étoiles européennes.

Sauvetage en mer : l’Humanité comme boussole


Le 14 juin dernier, un bateau de pêche transportant 750 personnes à son bord a coulé dans la mer au large de Pylos, en Grèce. Selon les derniers chiffres, 104

personnes ont été secourues, 82 corps ayant été retrouvés. D’après l’ONU, près de 289 enfants seraient morts en traversant la Méditerranée depuis le début de l’année. Au total, depuis 2014. En réponse à ce drame humain, le Parlement européen a adopté une résolution pour la mise en place d’une stratégie de recherche et de sauvetage fiable et permanente en Méditerranée. Une bonne nouvelle puisqu’une résolution similaire avait été rejetée en 2019.


Et cette résolution comporte des éléments très importants. D’abord, elle rappelle expressément le droit maritime international, qui oblige n’importe quel bateau à venir en aide aux personnes en difficulté, exigent le débarquement des personnes secourues vers un lieu sûr. Elle demande pour cela à la Commission la mise en place de missions de sauvetage durable et l’octroi de soutien matériel, financier et opérationnel aux États membres afin de renforcer la capacité globale à sauver des vies en mer. Enfin, elle rappelle le rôle primordial des associations humanitaires dans le sauvetage des exilés et appelle les Etats-membres à ne pas criminaliser les bénévoles et ONG. Je regrette néanmoins que la solution de sauvetage privilégiée par le Parlement européen soit une nouvelle fois confiée à Frontex, alors même que nous savons que ses gardes-côtes ne sont pas exemptés de responsabilités dans ces drames humains.


L’adoption de cette résolution est une bonne nouvelle, à l’heure où de nombreux pays européens se replient sur eux-mêmes et mettent en place des politiques racistes et xénophobes. Espérons que cela soit la première d’une longue série, pour enfin mettre fin à cette Europe forteresse, pour une Europe solidaire, humaine et digne de ses valeurs.


Protection des journalistes : une nécessité pour le bon fonctionnement démocratique


Partout dans le monde, des journalistes sont menacés, harcelés, emprisonnés voire tués, parce qu’ils exercent cette profession. Ainsi, en 2022, selon Reporters sans frontières, le nombre de journalistes placés en détention s’élève à 533 journalistes, battant ainsi le record établi l’année précédente. 57 journalistes ont perdu la vie, 65 journalistes étaient encore otages et 49 portés disparus à la fin de l’année dernière. Ces chiffres témoignent d’une triste réalité. Le métier de journaliste, pourtant si nécessaire au bon fonctionnement des sociétés et pour la liberté d’informations, est sans cesse menacé. Dans de plus en plus de pays, cette profession est remise en cause. C’est également le cas au sein même de l’Union européenne, dans des pays comme la Pologne ou la Hongrie, où les médias sont devenus des outils de propagande des gouvernements et où les journalistes sont parmi les victimes du logiciel espion Pegasus.

C’est pourquoi le Parlement européen a une nouvelle fois pris position en faveur de la protection des journalistes. Ainsi ce rapport très complet condamne les violences et intimidations auxquelles font face quotidiennement les journalistes, les détentions provisoires et les meurtres. Il déplore également les conditions d’emplois précaires de journalistes, ce qui les empêchent de pouvoir exercer vraiment librement leur profession, et ce qui les obligent parfois à s’autocensurer. De la même manière, il s’inquiète du recul du pluralisme des médias à travers le monde, notamment à cause du rachat de grands médias par des milliardaires comme cela peut être le cas en France, qui remet en cause l’indépendance des journalistes. Si nous voulons avoir une démocratie en bonne santé, avec la liberté de s’informer et de s’opposer, il nous faut une presse libre, indépendante et plurielle, avec des journalistes qui puissent exercer leur métier dans de bonnes conditions.

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